La résurrection du
Christ que nous célébrons chaque dimanche et, d’une manière plus intense
aujourd’hui dimanche de Pâques, constitue pour nous chrétiens le cœur de notre
foi. Etre chrétien, ne se réduit pas à croire que Dieu existe, ni même à lui
faire confiance ; beaucoup de non chrétiens font cela. Etre chrétien, cela
veut dire très précisément : croire
que cet homme, Jésus, que tous ont vu mort sur la Croix le Vendredi Saint, cet
homme qui a été mis dans un tombeau, cadavre sans vie, s’est montré vivant le
dimanche de Pâques. De même qu’il n’y a aucun doute sur le fait que
Jésus était vraiment mort (Jn 19, 33-34), il n’y a non plus aucun doute
sur le fait historiquement avéré qu’il
s’est ensuite manifesté vivant à ses Apôtres (Lc 24, 34). Et il ne s’agit
pas simplement d’être vivant dans le souvenir de ses amis, d’être présent
spirituellement aux côtés de ses proches, comme on peut le dire d’un défunt
dont la personnalité a été marquante. Il ne s’agit pas non plus d’une sorte de
fantôme ou d’un mort-vivant de film fantastique. Il s’agit de reconnaître que
Jésus est vivant avec son corps,
son propre corps de chair, ce même
corps qui était dans le tombeau sans vie la veille, et qui n’y était
plus le dimanche matin (Mc 16, 6 ; Jn 20, 2).
Voilà très précisément
ce que cela veut dire d’être chrétiens : croire à la réalité de la
résurrection du Christ, corps et âme. Celui qui croit cela est chrétien ;
celui qui ne croit pas cela… Le chrétien est-il fou de croire cela ? La
résurrection ne serait-elle qu’une belle idée, un beau mythe qui console et qui
aide à vivre ? Mais croire que la résurrection est un événement historique concret,
réel : est-ce bien raisonnable ? Il faut bien voir que notre foi ne repose extérieurement que sur le témoignage des apôtres. Les
récits que nous venons d’entendre (Jn 20, 1-9) nous l’expliquent
clairement. Moi, je n’ai pas vu le Christ ressuscité ; il ne m’est pas
apparu. Mais, si je n’ai pas eu d’expérience sensible du ressuscité, je connais
les textes où saint Pierre, saint Paul… témoignent de cette rencontre
bouleversante qu’ils ont faite avec le Vivant de Pâques (1Co 15).
Honnêtement, je dois bien reconnaître que je n’ai pas de fondement pour
contredire ces témoignages. Soupçonner les apôtres de malhonnêteté serait léger : ils seraient venus voler le
corps et inventer des récits d’apparition (Mt 28, 13-15) – cela n’a pas de
sens ! Les suspecter d’erreur
serait inconvenant : les disciples connaissaient bien le Christ, ils n’ont
pu se tromper ni être trompés. Il ne saurait y avoir d’erreur sur la
personne : si celui qui s’est présenté à eux le matin de Pâques était un
imposteur, ils auraient eu tôt fait de le démasquer. Si les Ecritures
annonçaient que le Messie devait mourir et non ressusciter, saint Paul aurait
su nous l’expliquer de manière convaincante. Non, je dois reconnaître que le
témoignage des Apôtres est fiable, que les évangiles sont des textes solides et
consistants. Je n’ai pas de raison de les mettre en doute. Et c’est pourquoi je
choisis librement de croire ce qu’ils affirment. Je fais confiance à la parole
des premiers chrétiens et j’accepte de placer ma foi en Dieu à la lumière de ce
témoignage : ma foi en Dieu est foi au Dieu que Jésus Christ me révèle dans
l’événement de sa résurrection.
Désormais, étant certain
que le Christ, celui que tous ont vu mort, est vivant, je prends donc un risque : je prends le risque d’être chrétien. Je prends
le risque de faire de ma vie une vie chrétienne. Je sais que cela comporte des
exigences : si je vis moi-même dans la perspective de la résurrection, je
ne saurais faire n’importe quoi. La vie du Ressuscité est la lumière qui
oriente toute ma vie vers un bonheur éternel. Je ne vis pas pour mourir, mais pour ressusciter ; je n’ai pas
peur d’être anéanti dans la mort, car j’ai foi en la promesse du Christ. Ce qui
paralyse notre vie d’homme – il faut bien le reconnaître – c’est, plus ou moins
suivant notre âge ou notre état de santé, la peur de la mort (He 2, 15). Celui qui prend le risque d’être
chrétien a son regard changé : quand il regarde son futur, il voit la
mort, certes, il ne saurait y échapper, mais il voit aussi plus loin que la
mort ; il entrevoit déjà sa propre résurrection dans celle du
Christ. Celui dont le regard va au-delà de sa mort est chrétien ; celui
qui n’a pas d’autre horizon que sa mort…
Si je crois que la
résurrection n’est pas simplement une idée,
mais un fait, je comprends enfin que ma foi chrétienne non plus n’est
pas simplement une idée ou des valeurs, mais bien aussi des actes, des événements : être baptisé, prier, participer à la messe,
communier, se confesser. Une foi qui reste dans le domaine de l’intention, sans
jamais produire un acte concret est une foi en péril (Jc 2, 17-18).
C’est pour moi un devoir
de vous rappeler cela. Pour ceux qui sont croyants et qui mènent une vie
chrétienne régulière, ce ne sont que des rappels. Pour ceux qui, tout en
essayant de croire ont plus de difficultés à vivre en chrétiens, c’est une
exhortation. Pour tous – et pour moi le premier – cela constitue le cadre de
notre pauvre vie, sans cesse appelée à la conversion et qui tend à devenir
chrétienne. Que la Résurrection du Christ, qui nous illumine aujourd’hui, nous
conduise ainsi jusqu’à la vie éternelle.
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