mardi 12 août 2014

L'Assomption de la Vierge Marie



Les chrétiens de notre temps ont peut-être quelques difficultés avec cette fête de l’Assomption. Nous célébrons aujourd’hui l’entrée de Marie dans le ciel ; nous affirmons que Marie, avec son âme et son corps, est glorifiée auprès de Dieu. Est-il bien raisonnable de proclamer cela ? A notre époque scientifique, est-il sérieux de dire que Marie est montée au ciel ? N’est-ce pas une idée bonne pour le Moyen Age obscurantiste ? Et puis pourquoi Pie XII, en 1950, a-t-il décrété que cette vérité était obligatoire, qu’elle appartenait au dogme, à la définition même de la foi catholique ? Cela fait beaucoup de difficultés et il serait utile de clarifier un peu ce qui est confus.
Essayons de comprendre d’abord ce qu’est un dogme. Un dogme n’est pas une invention du Pape, qui se lèverait un beau matin avec une idée nouvelle qu’il voudrait imposer à toute l’Eglise. Si c’était cela, notre foi serait une collection de décisions humaines et il serait insensé d’être chrétien. Un dogme c’est, en vérité, la reconnaissance d’une affirmation qui a toujours été crue, implicitement ou explicitement, par tous les chrétiens de tous les lieux et de tous les temps. Pour définir un dogme, un Pape n’est pas chargé d’inventer une idée nouvelle. Pour définir un dogme, un Pape est chargé d’aller vérifier ce que pensaient les premiers chrétiens, les chrétiens du Moyen Age, la Renaissance, et puis ce que pensent les chrétiens d’Europe, d’Amérique, d’Asie et d’Afrique. Le Pape interroge des historiens, il lit les textes des Pères de l’Eglise ; il consulte tous les évêques du monde entier, qui eux-mêmes interrogent des théologiens. Et si, sur une question, on découvre que les chrétiens ont toujours pensé, cru et célébré la même chose, si on découvre que tous les évêques parlent d’une seule voix, alors on doit bien se dire que cette vérité-là n’est pas anodine.
C’est ce que Pie XII a fait à propos de l’Assomption. Parmi les textes des premiers chrétiens, des Pères de l’Eglise, des Docteurs médiévaux, pas un seul n’affirmait que Marie ait été enterrée. Il y avait là une unité de pensée. Mais il fallait vérifier encore que cette idée n’était pas seulement l’opinion des théologiens, mais bien la pensée de toute l’Eglise, des prêtres et des laïcs, des théologiens et des simples fidèles. Une étude historique subtile et précise a indiqué un argument décisif : aucune église, aucune ville n’a jamais revendiqué posséder le tombeau où Marie aurait été enterrée. En effet, si des chrétiens avaient pensé que Marie n’était pas montée au ciel avec son corps, ils auraient été capables de dire où elle était enterrée ; on aurait organisé des pèlerinages, des processions. On ne peut, par exemple, dire la même chose de saint Pierre : tout le monde sait où il a été enterré ; tout le monde connaît son tombeau. En revanche, la preuve que tous les chrétiens ont toujours et partout pensé que Marie était montée au ciel, c’est que personne n’a jamais prétendu posséder sa tombe. Une fois que cela  était vérifié, il restait encore à consulter les évêques du monde entier pour recevoir par eux l’avis de tout le peuple chrétien. C’est ce qui fut fait. Aucun évêque ne témoigna que son diocèse pensait que Marie était simplement morte et enterrée. Ainsi, constatant que cette vérité était partagée par tous les chrétiens de tous les temps et de tous les lieux, Pie XII a reconnu que l’Assomption de Marie était plus qu’une opinion, qu’elle était une vérité certaine.

Il faut reconnaître que, parmi les dogmes qui composent notre foi, certains sont mieux acceptés que d’autres. Ainsi, le dogme de la Trinité est aujourd’hui accueilli sans trop de polémique. Car on pense (peut-être à tort) que ce dogme de la Trinité ne concerne que Dieu, et, par conséquent, il ne gêne pas grand monde. Les athées ne nous reprochent pas de croire en Dieu Trinité ; ils s’en moquent peut-être, mais ils ne nous en veulent pas. Les dogmes les plus difficiles à accepter sont ceux qui concernent des réalités matérielles, visibles. Le dogme de l’Eucharistie, par exemple, est beaucoup plus troublant pour les athées. Nous disons que ce pain consacré est devenu le corps du Christ ; un scientifique athée pourra toujours nous dire que nous sommes fous. Dès lors que le dogme concerne une matière, un corps, ceux qui ne conçoivent que le monde matériel nous accusent de tomber dans l’illusion. La Résurrection de Jésus également est incompréhensible pour ceux qui n’ont pas la foi : comment un cadavre peut-il sortir vivant du tombeau ? Un cadavre, tout le monde le sait, est un corps qui a définitivement cessé de vivre. Nous chrétiens, croyons pourtant que Jésus est ressuscité, parce que nous croyons que, au-delà de la matière, l’amour de Dieu est une source intarissable de vie. Nous ne pouvons pas prouver que l’éternité de Dieu vient façonner l’histoire ; nous ne pouvons pas convaincre un athée que l’Esprit de Dieu vient transfigurer la matière. Et pourtant, nous ne sommes pas fous.
Les dogmes que nous proclamons ne sont pas des lubies ou des contes de fées. Les dogmes que nous affirmons sont des vérités fondatrices, des vérités vivantes, des vérités sur lesquelles s’enracine la communion de tous les chrétiens à travers les cultures, à travers les âges. En célébrant aujourd’hui l’Assomption de Marie, prenons pleinement conscience d’être unis à toute l’Eglise ; prenons conscience de cette profonde communion dans la vérité. L’Eglise est une communauté de foi ; les dogmes nous permettent de croire ensemble à des vérités solides, fiables, réelles. Que cette certitude soit pour nous une aide et une joie.


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