vendredi 22 mai 2015

Pentecôte - année B

 
Basilique Saint Pierre - détail du baldaquin et de la coupole

A qui pouvons-nous obéir pour être libres ? N’ayons pas d’illusion : n’obéir à personne constituerait sans aucun doute le pire des esclavage et – si tant est que ce soit possible – cela ne conviendrait pas à l’homme, et nullement au chrétien. Les formules du style : “ni Dieu ni maître” n’ont jamais libéré qui que ce soit et n’ont conduit personne au bonheur véritable. Nous avons besoin de Dieu, nous avons besoin d’un maître. De manière plus constructive, nous pouvons exercer notre liberté fondamentale pour choisir à qui nous voulons obéir. Et ainsi, notre vie est orientée dans une direction ou une autre, selon ce que nous avons choisi librement. Saint Paul illustre deux directions possibles et opposées concernant le choix que nous pouvons faire : voulons-nous obéir à la chair ? ou bien voulons-nous obéir à l’Esprit ? (cf. Ga 5, 16) Voyons donc où chacun nous mène.
Obéir à la chair, cela revient à faire de soi-même, de son corps, de ses conditionnements biologiques et sociologiques une norme de nos actions. Réduire l’homme à n’être qu’un animal un peu plus développé, sans remarquer qu’il a une conscience ; penser que nous avons un destin devant lequel nous ne pouvons pas décider ; croire que la morale ne serait qu’une expression de la biologie ; se résigner à vivre dans un monde où il faut se conformer, en paroles et en actes, à l’opinion du plus grand nombre. Evidemment, alors : à quoi bon lutter ? à quoi bon se battre pour élever le niveau ? à quoi cela sert-il de défendre des convictions ? Avec de tels principes, il est sans doute facile de vivre, mais il est impossible de vivre heureux. Il faut prendre le temps de bien lire ces listes étonnantes dans lesquelles saint Paul décrit la finalité des œuvres de la chair : « débauche, impureté, obscénité, idolâtrie, sorcellerie, haines, querelles, jalousie, colère, envie, divisions, sectarisme, rivalités, beuveries, gloutonnerie et autres choses du même genre » (Ga 5, 19-21). Aujourd’hui on dirait : « pornographie, alcoolisme, drogue et délinquance ». Cette accumulation de termes peu plaisants et peu complaisants nous submerge peut-être. C’est sans doute ce que saint Paul a voulu, pour bien montrer le dégoût, la nausée qui est le résultat de l’obéissance à la chair.
Nous pouvons au contraire obéir à l’Esprit. Qu’est-ce à dire ? Depuis notre confirmation, nous avons reçu l’Esprit de Dieu afin que nos actes soient désormais guidés et soutenus par une force nouvelle. Cet Esprit Saint nous montre sans cesse la lumière de la vérité et, dans notre conscience, nous permet de comparer les règles de nos actions à la parole de Dieu. Lorsque je suis placé devant un choix, je peux consulter l’Esprit Saint et, éclairé par lui, il m’est possible et facile de décider une action juste, vraie, une action sainte. Ce n’est pas que cette action soit, en elle-même, toujours aisée ; parfois cela demande un sacrifice, un effort, parfois cela coûte. Mais, si l’action reste difficile à accomplir, elle est aisée à décider.
Comprenez bien qu’il ne s’agit pas, pour obéir à l’Esprit, d’obéir à une autorité extérieure à nous-mêmes. Personne n’obéit jamais à une autorité extérieure. Obéir à l’Esprit, cela veut dire exactement : laisser sa conscience être éclairée par l’Esprit Saint et ensuite obéir à sa conscience. Nous n’obéissons pas à Dieu de telle sorte que Dieu nous contraindrait de l’extérieur. Nous obéissons à Dieu de telle sorte que Dieu nous montre, dans le sanctuaire de notre conscience où est la vraie liberté ; et alors, en conscience, nous pouvons obéir à la liberté. Notre conscience est plus intime à nous-mêmes que notre chair. Obéir à la chair reste donc une obéissance plus extérieure, plus superficielle, que d’obéir à sa conscience, que d’obéir à l’Esprit.
Prenons le temps encore de lire cette longue liste que donne saint Paul : « amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, foi, humilité et maîtrise de soi » (Ga 5, 22-23). Evidemment, la maîtrise de soi, la bienveillance, l’humilité sont très exigeantes. Cela demande un travail sur soi-même, un combat contre la facilité de la chair. Mais alors que la chair ne produit finalement que trouble et désespoir, l’Esprit nous ouvre à la joie et à la paix. Il ne s’agit pas de faire de publicité mensongère : obéir à l’Esprit est plus laborieux ; se laisser conduire par la chair semble plus naturel, plus simple. Mais pour être juste, il faut dire aussi que le travail de l’Esprit nous guide plus sûrement vers un bonheur authentique, tandis que les inclinations de la chair, incohérentes et tyranniques, nous enfoncent rapidement dans des ténèbres effrayantes.
Alors, qui voulons-nous suivre ? Nous sommes placés devant un choix. Le choix d’un côté ou de l’autre est libre. En revanche il est nécessaire de faire un choix ; nous ne pouvons pas ne pas choisir. Saint Paul a voulu nous donner quelques critères de discernement, quelques repères utiles. Mais saint Paul n’a pas choisi à notre place : il nous guide, il nous éclaire, mais c’est à chacun de nous qu’il revient de décider qui sera notre maître. Et pourtant, si nous sommes chrétiens, nous savons bien que nous ne sommes pas seuls devant ce choix. Nous sommes soutenus par la foi des autres croyants, nous nous soutenons mutuellement dans la prière. Ayons assez de courage pour nous laisser guider par l’Esprit Saint, pour nous tourner vers le vrai bonheur ; nous ne serons pas déçus.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.