vendredi 25 avril 2014

2ème dimanche de Pâques - année A

La foi, nous dit saint Pierre, est « bien plus précieuse que l’or » (1P 1, 7). Qu’est-ce qui est bien plus précieux que l’or, de nos jours ? Avec l’incertitude de la crise économique, les cours de l’or atteignent depuis quelques années des sommets historiques et on voit mal, au premier abord, ce qui pourrait dépasser la valeur du métal refuge, à part le platine ou le diamant. Dans l’Antiquité, la situation était encore plus radicale : l’or était la valeur monétaire absolue, la référence de tous les autres échanges commerciaux ou fiscaux.
Mais, ne nous laissons pas impressionner par les vertiges de l’économie humaine et réfléchissons un peu. Un bijou en or, par le travail de l’orfèvre, par l’habileté de celui qui l’a conçu, modelé, réalisé, vaut plus que l’or seulement qui n’est alors qu’une matière première. Ainsi, on voit que le travail humain est capable de donner à l’or une valeur ajoutée. Nous sommes donc capables de concevoir que l’homme, par son génie artistique, par sa créativité, puisse accroître le prix à ce qui semblait tout à l’heure être la valeur suprême.
Voyons alors ce qui, dans l’ordre spirituel, pourrait nous permettre de comprendre cette image. Qu’est-ce que la foi posséderait qui ferait de cette vertu, de cette attitude, une réalité plus précieuse que l’or ? Notre foi repose sur le sang du Christ ; nous avons vu quel était la charité du Christ en notre faveur lorsque nous avons contemplé le Crucifié, celui qui, sans violence, se laissait tuer par amour pour nous. Et ce n’est pas un hasard si saint Pierre dit ailleurs que le sang du Christ versé en notre faveur fut « précieux » (1, 19). Combien a coûté le sang du Christ ? Un rapide calcul va nous montrer le paradoxe dans sa merveilleuse clarté : pour celui qui a vendu le Christ, cela lui a rapporté trente deniers ; mais pour nous qui sommes sauvés par le sang du Christ, le salut nous est donné, gratuitement. Voilà une vérité spirituelle très importante : une chose précieuse, dans la Bible, est une chose qu’on peut vendre pour pas cher – et celui qui l’a vendue reste pauvre – mais qu’on peut recevoir gratuitement – et celui qui l’accueille est comblé. Qu’a gagné le traître à vendre le sang du Christ ? Le pitoyable salaire d’un mois de travail et un désespoir tel qu’il s’en est pendu. Qu’a gagné l’Eglise en recevant gratuitement le sang précieux du Christ ? Elle a reçu le salut, la sainteté, la joie et le courage. C’est donc que le sang du Christ est précieux. 

Dans la logique du monde, une chose est précieuse,
qui coûte cher à acheter et à vendre ;
pour l’évangile, est précieux ce qui ne rapporte rien à la vente,
qui s’acquiert gratuitement
et qui comble absolument les désirs de l’homme.

Et la foi, donc, en quoi est-elle précieuse ? Dans certaines persécution, on propose aux chrétiens de renoncer à leur foi, de perdre leur foi, et les persécuteurs sont disposés à leur acheter leur foi : ce sont des avantages matériels, des privilèges, des honneurs, parfois simplement la vie sauve. Que gagne-t-on à vendre ainsi sa foi ? On ne gagne que des biens terrestres qui sont incapables de nous rendre heureux. Mais, ayant renoncé à la foi, on voit, en conscience, qu’on a trahit ce Dieu qui nous fait vivre ; avec culpabilité, on se sent privé de Dieu, et cela rend malheureux. On ne renonce pas à la foi pour être heureux ensuite ; car cela, c’est impossible. Les premiers chrétiens le savaient bien, qui avaient appris le courage de défendre leur foi chrétienne jusqu’au martyre. Perdre la foi, c’est donc perdre le bonheur. Vendre sa foi, c’est obtenir quelques gratifications pour se perdre soi-même. Si la foi est précieuse, on n’a donc pas intérêt à la vendre.
Mais on a intérêt à la recevoir, d’autant plus qu’elle est gratuite. D’où vient la foi ? C’est en effet un don de Dieu (cf. Ep 2, 8). Dieu nous fait-il payer la foi qu’il nous donne ? Non. C’est gratuitement, c’est par pure grâce que nous avons reçu la foi à notre baptême. La plupart d’entre nous, nous étions enfants et c’est sans mérite préalable que nous sommes devenus croyants. Et même si nous sommes devenus croyants par une décision volontaire, c’est toujours comme un cadeau de Dieu que nous avons accueilli la première connaissance de l’évangile. Et cette foi, que nous apporte-t-elle ? Elle nous donne la vérité dans ce monde d’ignorance et d’opinions contradictoires ; elle nous donne le courage dans ce monde désespéré ; elle nous donne la joie dans cette société dépressive ; elle nous donne la paix, alors que l’injustice et la guerre sont partout ; elle nous donne un regard pur et lucide, alors que la tyrannie de l’image et de l’illusion mène la société. En un mot : elle nous donne le salut dans ce monde qui va à sa perte.
Voilà pourquoi la foi est précieuse : parce que, gratuitement, elle nous introduit dans une logique différente. Vendre sa foi pour quelques sous serait un bien mauvais calcul ; mettre de côté ses convictions chrétiennes pour quelque avantage matériel, quelque réussite mondaine serait une ruine. L’or est précieux, mais le travail de l’orfèvre est plus précieux encore, avons-nous dit. La matière première de la foi, c’est notre âme, qui vaut plus que l’or ; et l’orfèvre de notre âme, c’est Dieu, qui vaut mieux qu’un orfèvre. Voilà pourquoi la foi est gratuite, pourquoi elle est précieuse et pourquoi elle dépasse toute valeur humaine.



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Il est impossible de passer sous silence l'événement de ce 27 avril 2014, la canonisation des Papes Jean XXIII et Jean-Paul II. Avec le lien ci-dessous, vous pouvez accéder à la traduction française officielle de l'homélie du Pape François. 

http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/homilies/2014/documents/papa-francesco_20140427_omelia-canonizzazioni.html



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