dimanche 5 mai 2013

6ème Dimanche de Pâques - Année C


Les Apôtres, réunis en concile à Jérusalem doivent traiter une question de grande importance : faut-il soumettre ceux qui se convertissent à l’évangile à l’observance de la loi de Moïse ? En d’autres termes : un païen doit-il devenir d’abord juif pour devenir ensuite chrétien ? Plus que la réponse à cette question (réponse qui est tellement évidente aujourd’hui que la question ne se pose plus), je voudrais relever la méthode d’argumentation.
Les Apôtres ont-ils par eux-mêmes la capacité de répondre ? Jésus lui-même n’a laissé aucune consigne explicite à ce sujet. Par quelle autorité pourraient-ils donc trancher ? Les disciples sont en revanche capables de discuter entre eux de ce problème, et c’est ce qu’ils ont fait. Nous n’avons pas entendu tout le récit, mais, dans vos Bibles, vous pourrez lire les interventions de Pierre, de Barnabé et Paul, de Jacques. Après ces discours, il y a eu sans doute des débats, des remarques, des polémiques même. Car jamais l’Eglise n’a été le lieu de la pensée unique ; au contraire, dès les origines, l’Eglise est le lieu d’un débat dans la vérité et dans la charité. Car la vérité n’est pas quelque chose qui s’affirme de manière péremptoire ; la vérité, c’est ce qui se découvre, ce qui se révèle dans la rencontre. Si chacun a « sa » vérité, dans son coin, tout seul, alors il n’y a pas de communion, et il n’y a pas non plus de vérité ; et l’Eglise, c’est précisément le contraire de cela.
Les Apôtres ont donc eu raison de débattre publiquement de la grave question qui leur était posée. Mais une fois que chacun s’est exprimé, il fallait bien prendre une décision. Et c’est là qu’on peut être un peu surpris ; quelle est la réponse des Apôtres ? « L’Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé… » (Ac 15, 28). Voilà une formule bien prétentieuse : les Apôtres ont discuté entre eux ; l’Esprit Saint n’a pas discuté parmi eux. Et pourtant, la décision qui est prise est attribuée conjointement à l’Esprit Saint et aux Apôtres. N’est-ce pas là un coup de force pour impliquer Dieu dans une décision humaine ?
Tout en reconnaissant que cette façon de parler est audacieuse, il nous faut prendre conscience que notre foi catholique nous oblige à prendre au sérieux une telle formule. Qu’est-ce que l’Eglise ? Pour un catholique, l’Eglise c’est l’humanité qui peut dire « nous » avec l’Esprit Saint. Qui est l’Esprit Saint ? L’Esprit Saint est Dieu qui ne craint pas d’être associé à l’Eglise comme sujet d’un verbe, pour accomplir une action conjointe.
Après ce concile de Jérusalem, il y a eu, tout au long de l’histoire de l’Eglise, d’autres conciles, d’autres réunions, non pas d’apôtres, mais d’évêques, pour discuter de questions très difficiles et très graves. Et toujours, à toutes les époques, les Pères conciliaires ont eu conscience de décider avec l’Esprit Saint. Ecoutez la conclusion solennelle des documents publiés par Vatican II, ces petites phrases qu’on ne lit jamais : « Tout l’ensemble et chacun des points qui ont été édictés dans cette constitution dogmatique ont plu aux Pères. Et Nous [Paul VI], en vertu du pouvoir apostolique que Nous tenons du Christ, en union avec les vénérables Pères, Nous les approuvons, arrêtons et décrétons dans le Saint-Esprit, et Nous ordonnons que ce qui a été ainsi établi en Concile soit promulgué pour la gloire de Dieu ». Les Pères conciliaires sont-ils fous de dire cela ? Non. Ils ont simplement conscience d’être l’Eglise du Christ, c’est-à-dire une communauté conduite par l’Esprit Saint.
Dans quelques jours, nous célèbrerons la Pentecôte. Souvenons-nous toujours que l’Esprit Saint, qui est présent dans nos cœurs, est d’abord celui qui conduit l’Eglise. Alors nous pourrons vivre la fête qui approche dans une communion plus intense et plus ecclésiale. 

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